COMPRENDRE LE TISSAGE

REALISATION D'UNE DE MES ETOLES: ETAPES PRINCIPALES/DIFFICULTES TECHNIQUES

 

Tisser une fibre totalement naturelle et fragile, comme cette alpaga qui ne tient que sur un petit fil de soie, nécessite un savoir-faire à chaque étape qui pourrait s'intituler : "Qu'est-ce qui distingue une machine d'un artisan ?"

Tout d'abord, il va falloir préparer tous les fils de la même longueur et dans le bon ordre. Cette étape s'appelle l'ourdissage. Ces fils étant très collants par électricité statique, cette 1ère étape préliminaire relève déjà du défi. Il faut ensuite les placer sur le métier en gardant le bon ordre et enrouler en gardant la même tension pour chaque fil afin de pouvoir procéder à l'enfilage. Les photos sont prises à partir de cette étape finale d'enfilage et d'empeignage précédant le tissage. 

L'enfilage consiste à passer chaque fil, dans le bon ordre, dans chaque lisse (les éléments métalliques composés d'un petit trou sur la photo) tout en respectant l'ordre de l'armure choisie par le tisserand.

ENLISSAGE

L'armure est l'ordre d'enfilage des fils dans chaque cadre. Sur ce métier, on travaille sur 4 cadres, eux mêmes reliés à 4 ou 6 pédales. Le mien en a 6. Par exemple, pour un simple sergé, l'une des armures fondamentales de base, il va exister des milliers d'enfilage possibles de "dérivés" de sergé, que l'on nomme "STRUCTURES" (ce sont les motifs créés par l'entrecroisement différent des fils). Il n'existe que 3 ARMURES FONDAMENTALES: la toile, le sergé et le satin. La plupart des motifs réalisés sur métiers à 2, 4, 6, 8 cadres ou plus sont tous des variantes de ces 3 armures fondamentales. Notons aussi que les structures de type "overshot" nécessitant des fils de liaisons sur un minimum de 6 pédales ne sont pas développées par l'industrie (ex d'une de mes étoles dans cette technique Echarpe écrue/anthracite, overshot )

Ici on va enfiler un sergé classique simple 2/2, celui utilisé par les celtes lorsqu'ils inventent le métier à 4 barres de lisse au tout début du 1er Âge du Fer. Il s'agit de tisser en faisant passer 2 fils dessus/2 fils dessous en décalant à chaque rang, ce qui croise les fils et forme une diagonale. A l'époque, on travaillait sur des métiers verticaux de haute lisse à pesons. Le tissu devient alors plus solide tout en gardant des propriétés d'élasticité. C'est ce même principe qui est utilisé ici sur mon métier à 4 cadres à pédales, en l'appliquant simplement à l'horizontal (le passage au tissage à l'horizontal se fait au début du Moyen Âge et prend en ampleur au XIIIe siècle de notre ère, malgré tout souvent encore limité à 2 cadres et 2 pédales).

Pour enfiler un sergé 2/2 sur ce métier, il va falloir passer chaque fil selon un ordre régulier dans chaque lisse de chaque cadre selon le rythme 1-2-3-4 sachant que l'ordre d'attachage des pédales devra dans ce cas, pour cette armure, suivre l'ordre: 1-2/ 2-3/3-4/1-4 les chiffres correspondant aux cadres devant s'activer ensemble.

Cette étape a priori élémentaire pour tout tisserand se complique évidemment lorsqu'il s'agit de travailler des fibres volatiles ou fragiles ou réceptives à l'électricité statique.

Ces critères vont jouer sur le choix de l'armure selon l'utilisation que l'on souhaite en faire. Ici je souhaite réaliser une étole en fibres légères et extra douces mais qui doit rester solide pour résister à l'usure du porter et du lavage (obligatoirement à la main pour garder toutes les propriétés naturelles de la fibre). Je la souhaite particulièrement dense pour accroître ses propriétés de chaleur, tout en restant souple. J'ai donc préalablement choisi la densité. C'est le nombre de fils au cm qu'aura le tissage final.

Le choix de la densité est lié à mon expérience de cette fibre et aux années d'expérimental de différentes options déjà réalisées au préalable.

DENSITE

La densité va permettre d'installer le peigne approprié sur le métier à tisser. Ensuite intervient l'étape ultime d'empeignage où chaque fil, une fois passé dans les lisses, va devoir être passé dans chaque fente du peigne. Lors de ces 2 étapes, chaque erreur impliquerait d'avoir à tout refaire depuis le début. Si une fente est oubliée ou que 2 fils se retrouvent dans la même fente ou que 2 fils se sont "collés" lors de l'enlisage, il y a un risque énorme de rupture de chaîne. EMPEIGNAGE    EMPEIGNAGE  EMPEIGNAGE

EMPEIGNAGE

On pourrait au final résumer la réussite de ce tissage de fibres d'alpaga/soie par la maîtrise des étapes suivantes:

- Le choix de la densité et de l'armure = expérience= garantie de solidité du tissu et de sa réalisation

- les navettes de tissage à préparer intelligemment= habileté et expérience sans lesquelles la réalisation sera impossible.

- l'enfilage et l'empeignage= combat contre le collage dû à l'électricité statique déterminés par le choix de la densité.

Au final? Un tissu totalement sans ajouts de substances, respirant, sain, léger, hypoallergénique et vous faisant bénéficier de toutes les propriétés naturelles de la fibre intacte d'origine!

Quelques exemples de mes réalisation dans cette matière

ALPAGA/SOIE

PONCHOS

Ponchos, chauffe-épaules et capelines tissés à la main

Bonnets en tissage et crochet réalisés à la main

En dehors de cette difficulté qui, ici, est uniquement liée à la matière, il existe bien d'autres difficultés techniques selon la difficulté des armures. Cette expérience est en perpétuelle évolution chez moi car je réalise beaucoup de variations de brefs (patrons anciens) en jouant à la fois sur le rythme, le type de pédalage et la technique de tissage.

 

ETOLE ALPAGA/SOIE   ETOLE ALPAGA/SOIE   ETOLE ALPAGA/SOIE   ETOLE ALPAGA/SOIE   ETOLE ALPAGA/SOIE

 

Voir aussi: COMPRENDRE LES PRIX et MES METIERS A TISSER

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VIDEO D'UN AUTRE ATELIER RESUMANT LES PRINCIPES DE BASE

Voici un petit film réalisé par Et Saar'part pour le château de Montségur.

Il montre les principes de base du tissage en images.

Date de dernière mise à jour : 25/03/2025

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